« La France est loin d’être la seule à penser qu’il s’agit d’un enjeu de souveraineté »


Disposer de modèles d’intelligence artificielle (IA) français et européens est « un enjeu de souveraineté technologique », a affirmé Emmanuel Macron mi-novembre 2023, à l’occasion de la création de Kyutai, un laboratoire de recherche en IA lancé par Xavier Niel, fondateur du groupe de télécoms Iliad (et actionnaire à titre personnel du Monde), Rodolphe Saadé, PDG de l’armateur CMA CGM, et Eric Schmidt, l’ex-DG de Google. Le but de cette initiative française est d’aider à créer des logiciels capables de générer des contenus texte, audio et vidéo comparables à ceux de grands acteurs comme Google, Meta ou OpenAI, le créateur de ChatGPT.

C’est également la mission de start-up françaises comme LightOn, Hugging Face ou Mistral AI (vue par le président de la République comme une expression du « génie français »). Dans un raisonnement assez légitime, l’exécutif français juge important de ne pas laisser à quelques géants américains le monopole d’une technologie d’usage assez général, comme cela avait été le cas par le passé avec les réseaux sociaux, les moteurs de recherche ou les écosystèmes mobiles.

La France est loin d’être la seule à penser que l’IA devient un enjeu de souveraineté. L’Allemagne promeut sa start-up Aleph Alpha. Les Emirats arabes unis ont lancé AI71 et l’Inde Krutrim et Sarvam AI, elles aussi destinées à faire émerger des modèles d’IA locaux, relève The Economist. L’hebdomadaire britannique libéral décèle même une « ère du nationalisme de l’IA », dans laquelle « les Etats souverains se lancent dans une course pour contrôler leur destin numérique ».

Cette volonté laisse émerger toutefois certains défis. Que les modèles de langue « ne soient pas seulement nourris de contenus en anglais » est un « défi civilisationnel », a déclaré M. Macron. Cédric O, lobbyiste de Mistral AI et ex-secrétaire d’Etat, répète qu’un robot conversationnel attribuera, en fonction de son pays d’origine, l’invention de l’avion au Français Clément Ader, aux frères américains Orville et Wilbur Wright ou au Brésilien Alberto Santos-Dumont. L’Etat a promis d’apporter son aide en mettant à disposition des textes et des images francophones d’entités publiques comme la Bibliothèque nationale de France ou l’Institut national de l’audiovisuel. En Inde ou en Afrique, l’enjeu du multilinguisme et des langues et dialectes peu représentés en ligne est immense. Mais les géants américains, comme Meta ou Google, se font fort, eux aussi, d’être à l’avant-garde de la traduction par IA, avec des grands modèles gérant des dizaines ou des centaines de langues.

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Catégorie article Politique

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